Ce débat paraît
bien dérisoire au vu des périls qui nous menacent, mais je pense qu’il est une
occasion de réfléchir à la citoyenneté. Être citoyen, ce n’est pas répondre
simplement oui ou non à une question posée à chaud, ce n’est pas réagir avec
ses tripes face à la haine, ce n’est pas accepter que les sondages guident les
politiques. D’ailleurs c’est bien les malades que l’on sonde, pour les nourrir,
les calmer et faire parler leur corps, car selon une vision étroitement
rationnelle de la médecine, le malade n’a rien d’utile à dire au médecin, si ce
n’est répondre oui ou non à ses questions. Le grand corps malade c’est le
peuple, en état de choc émotionnel et d’apathie électorale, et les médecins qui
l’auscultent, nos technocrates élus comme on choisit un praticien.
La question de
la déchéance de nationalité concerne à mon avis doublement la citoyenneté.
D’abord il faut
se rappeler que la nationalité et la citoyenneté sont deux qualités distinctes,
la première est purement juridique alors que la seconde a une dimension éminemment
symbolique, politique et morale. Or il me semble que c’est bien sur ce terrain
qu’il faut d’abord lutter contre le fanatisme. Ainsi il serait beaucoup plus
pertinent et efficace, outre la déchéance des droits civiques, d’utiliser les
concepts de trahison et d’intelligence avec l’ennemi, qui permettent d’ailleurs
juridiquement de prononcer des peines aggravées. Considérer que la déchéance des
droits civiques n’a pas à en elle-même un poids suffisant, en dit long sur le
peu de considération qu’ont nos technocrates pour la citoyenneté réduite à la
transhumance électorale à date fixe vers les bureaux de vote.
Il y a un deuxième
aspect de la question, au fond plus grave. La technocratie s’arroge le droit de
modifier la constitution sans en référer aux citoyens juste bons à être sondés,
et donc considérés comme incapables de délibérer. Or les bruits de bottes que l’on
entend doivent titiller les oreilles des démocrates de tous bords. Deux
réformes sont à mon avis essentielles : la possibilité du référendum d’origine
populaire, et l’impossibilité de modifier la constitution sans en passer par le
référendum. La démocratie n’est pas un état, c’est un processus.
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