vendredi 8 mai 2015

Peut-on accueillir toute la misère du monde ?



Poser la question en ces termes, c’est déjà y répondre. Elle n’est donc qu’un artifice rhétorique visant à justifier la fermeture des frontières, en évitant de poser la bonne question : Quelle politique serait juste vis à vis de ceux qui sont prêts à tout pour venir en Europe afin d’échapper à la guerre ou à la misère ?
Il faudrait d'abord prendre la juste mesure des images dont on nous gave à longueur de J.T, montrant des masses d’individus hagards et épuisés. Elles masquent le fait qu'il faut à chacun d’eux une détermination, une intelligence et un courage hors du commun. Bref loin des pauvres êtres sans ressources qu'on nous présente, les pays du sud nous offrent « gratuitement » la crème de leur richesse humaine. D’ailleurs, plusieurs études révèlent que les immigrés apportent plus à leur pays d’accueil qu’ils ne lui coûtent. Ainsi l’image, omniprésente dans les médias, d’un misérable cortège d’indigents transportés dans des bétaillères est totalement fallacieuse. 
Par ailleurs la politique de fermeture des frontières et d’internement des clandestins a un coût complètement exorbitant… comparé à sa dramatique inefficacité. Elle a aussi un effet de cliquet redoutable : ceux qui réussissent à passer malgré tous les obstacles seront prêts à tout pour rester car ils savent qu’ils n’auront probablement pas deux fois la même chance, ils sont donc condamnés à une vie misérable de clandestin, travaillant au noir et vivant dans des taudis insalubres.
Une porte est soit ouverte, soit fermée, c’est le piège logique qui nous enferme dans une alternative entre deux positions diamétralement opposées ; rejeter ou accueillir « toute la misère du monde ». Mais une frontière n’est pas une simple porte. Une politique intelligente et suffisamment courageuse pour résister à l’ambiance générale de repli sur soi, de peur et de xénophobie, consisterait à instaurer des visas d’entrée pour une durée déterminée, à un prix inférieur à celui des mafias de passeurs, à rendre plus simple et plus rapide l’examen des demandes d’asile, à conditionner la prolongation du visa aux conditions d’hébergement et de travail de celui ou celle qui en fait la demande, à être d’une fermeté redoutablement dissuasive avec les passeurs, les marchands de sommeils et les entreprises qui exploitent le travail au noir. Contrairement aux immigrés, le courage n'est pas la vertu la mieux partagée dans le milieu politique.

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