dimanche 6 janvier 2013

De quoi Depardieu est-il le nom ?


Quand le doigt de D. montre la Russie, les moralistes indignés voient dans ce geste le symbole des vices du moment : le scandale de l’exil fiscal ou l’indécence des salaires mirobolants. Essayons plutôt d’entrevoir la lune que nous montre D. « le sage » : dans notre monde connecté la mobilité est une valeur en soi, dis-moi comment tu bouges, je te dirai à quelle catégorie socio-mobile tu appartiens :
-       Les « hyper-mobiles », classe bizarre où se retrouvent à la fois les hyper-riches, ceux qui doivent leur position dominante à leur « hyper-mobilité » physique et financière, et les hyper-pauvres qui n’ayant plus rien à perdre, doivent absolument tout quitter. Les uns comme les autres jouent aux marges de la société, déchirent leur passeport d’origine, et comptent sur la bienveillance - fiscale ou sociale - de la société qui les accueille, pour sur-accumuler ou pour sur-vivre.
-       Les « mobiles-flexibles » qui constituent la classe adaptée au monde connecté, qui remplissent les charters pour polluer les plages du monde entier, mais qui doivent revenir chez eux avaler les couleuvres du néo-management libéral pour rester « employable », et se payer leur prochain voyage.
-       Les « hypo-mobiles », assignés à résidence dans les cités périphériques, les régions en  déclin économique, les zones rurales, où ils ont tout investi, et donc tout perdu.

Où est le problème ? 1) L’immobilité des uns est nécessaire à la mobilité des autres. Or 2) l’immobilité est source de misère. Voici selon moi la « lune » que nous montre le « sage » D. :
1)    D. vit du cinéma largement subventionné par les impôts des immobiles français qui en outre remplissent les salles de quartier faisant le succès commercial de ses films. Par ailleurs quand l’hyper-mobile D. sillonne le monde, il compte sur la stabilité des autochtones : il faudra bien des « vrais gens » du cru à Moscou, à Néchin ou ailleurs pour que D. puisse juste y vivre. Bref, pour que les « grands » ne tiennent pas en place, il faut que les petits fassent du surplace.
2)    Enracinement local, stabilité, attachement à un lieu, sont autant de noms de la précarité. Car la flexibilité est la condition de l’employabilité : il faut changer, bouger, avancer, s’adapter, ou accepter sans s’étonner d’être licencié, dépassé, obsolète. Alors que le monde des grands est un espace ouvert d’opportunités à saisir, en termes d’investissement, de régime fiscal, et dorénavant de nationalité, le monde des petits se rétrécit comme peau de chagrin.

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