jeudi 15 novembre 2012

Le mariage pour tous va-t-il de soi?


Dernière crise de panique morale : le mariage pour tous. D’un côté les bigots réactionnaires de tout poil, de l’autre la bien-pensance éclairée. Ma première impression : beaucoup de bruit pour pas grand-chose. Après tout, qui rêve encore de  mariage aujourd'hui à part les couples homosexuels et les prêtres défroqués ? Mais à y regarder de plus près, l'enjeu n'est peut-être pas si mince. Pour y voir plus clair, il faut bien dissocier les problèmes : la reconnaissance sociale des couples homosexuels, la question de l'homoparentalité, et celle du mariage « pour tous ».
1)    Tout d'abord on ne se marie pas en tant qu'hétérosexuel, mais en tant qu'homme et femme en vue d'un projet de vie commune. L'institution du mariage appuie ce projet par un ensemble de droits, de devoirs, qui visent essentiellement à fonder une famille, et donc à élever des enfants. Mais il est possible de dissocier ces deux aspects, n'est-ce pas l'objet du PACS ?
Il n'y a donc actuellement aucune discrimination, mais une définition du mariage qui exclut le mariage entre personnes du même sexe, comme d'ailleurs entre personnes ayant un lien de parenté. Le mariage « pour tous », si on prend l'expression à la lettre, chamboulerait complètement ce dispositif : pourquoi pas entre frère et sœur, père et fille, ou entre plus de deux personnes ?
2)    Il y a un autre enjeu de taille. Le mariage visait à l'origine à distinguer les enfants légitimes dont la paternité était garantie, et il est toujours resté essentiellement lié à la fondation d'une famille. Où est le problème ? L'apparition de la fécondation médicalement assistée permet aujourd'hui à un couple marié de réaliser un projet familial légitimé par l’union légale. Alors le mariage pour tous débouche de fait sur un droit à l'enfant pour tous, qui, s'il était refusé, constituerait une discrimination entre les couples homme / femme et les couples mono-sexuels. Mais ce droit poserait à l’évidence des problèmes éthiques extraordinairement ardus.
J’en conclus donc que le mariage pour tous est tout sauf une réforme anodine. Ce genre de questions ne devrait pas être laissé à la discrétion du président et de sa majorité. Il devrait faire l’objet d’une délibération publique, et d’un référendum.

1 commentaire:

  1. Un référendum sûrement pas... Pourquoi pas revenir sur la peine de mort ?
    J'ai lu le plaidoyer de Gilles Bernheim contre ce mariage "homo" http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2012/10/18/01016-20121018ARTFIG00522-le-grand-rabbin-de-france-s-oppose-au-mariage-homo.php
    Ses arguments sont évidemment très intéressants et très bien documentés mais, comme les tiens, ils ne me conviennent pas ni me me convainquent....
    Pour ma part, je ne me réfère qu'à ce que je vis ou aux différents témoignages que je peux recueillir. Celui des enfants d'homos, en particulier me paraissent dignes d'être entendus (si c'est encore disponible : http://www.franceculture.fr/emission-le-choix-de-la-redaction-enfants-de-couples-homo-2012-11-07 )

    Pour ma part, je considère que cette institution (le mariage) est un droit et qu'il n'y a aucune raison de discriminer telle ou telle population à cause de son orientation sexuelle.
    A partir du moment ou ce changement législatif ne retire rien à personne et qu'au contraire il supprime des inégalités de fait, j'ai tendance à y souscrire ne serait-ce que parce que je suis dans un pays dont la devise est "Liberté, Egalité, Fraternité".
    En tant que "libre penseur", je peux difficilement réagir autrement.

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