jeudi 15 mars 2012

Faut-il (re)fermer nos frontières?


Temps de crise ! Le thème de la frontière est de retour, alors que la postmodernité mondialisée semblait l’avoir jeté aux oubliettes de l’histoire. Tout se joue donc entre nous et eux (les autres, les non-nous) : nos riches veulent sortir, leurs pauvres veulent entrer, nos entreprises veulent délocaliser, les leurs veulent nous vendre leurs produits. Trois questions : 1) Faut-il une frontière ? 2) Comment la concevoir ? 3) Faut-il l’ouvrir ou la fermer ? Ces questions méritent évidemment de longs développements, il ne s’agit que de penser quelques principes.
1)  Principe d’existence : exister en tant que forme, c’est être limité. Le bord, la surface, la membrane, la peau, la frontière délimitent un intérieur d’un extérieur, une entité, une forme, vis-à-vis de ce qui n’est pas elle. L’entité « France » n’a tout simplement aucun sens sans frontières.
2)  Principe de forme : la frontière elle-même a une forme. On peut la concevoir comme un robinet ou une porte – ouverte ou fermée – ou comme une peau, une membrane poreuse qui filtre ce qui entre et ce qui sort pour permettre au milieu intérieur de développer sa norme propre. Je pense que la deuxième image est plus pertinente. La frontière-peau enveloppe quel corps ? Le corps politique dont deux conceptions s’opposent frontalement : corps national ou corps social ? L’un réfère à une identité nationale déterminée, qui sépare les français des étrangers, l’autre une communauté sociale qui sépare les contributeurs / ayant droit, des non contributeurs / non ayant-droit.
3)  Principe de discrimination : le corps national exclut simplement les (corps) étrangers, le corps social distingue ceux qui ont accès à la propriété sociale – un ensemble de droits et de protections - du fait qu’ils y ont contribué.
La conception nationale de la frontière alimente la xénophobie qui, comme l’histoire le montre à l’envi, est un poison grave. La conception sociale reste à penser face aux problèmes du jour, l’exil fiscal et l’immigration. Certains veulent s’exonérer de la contribution au corps social. Il « s’excluent d’eux-mêmes » - ce qui est leur droit le plus strict - : il faut les considérer comme des étrangers. Certains vivent ici, contribuent par leur travail, apprennent la langue commune pour participer au corps politique : il faut les considérer comme français.

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