« Tout acte
de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, ou tout acte
bucco-génital commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace
ou surprise, est un viol. » Cette définition de notre code pénal
risque d’être bientôt modifiée par l’inscription dans le droit français de la
notion de consentement.
Or la notion de consentement
est problématique car elle est polysémique et ambiguë. En effet, l’un des
sens du verbe consentir est accepter quelque chose qu’on ne peut pas
empêcher – le consentement à l’impôt
- ; un autre sens est accorder une
faveur – consentir un prêt. Il y
a ainsi dans l’idée de consentement une asymétrie entre deux
parties, une position d’infériorité ou au contraire de supériorité, mais l’équilibre
est possible aussi comme dans l’échange
de consentements qu’est le mariage. Le flou sémantique du consentement est d’ailleurs parfaitement
rendu par l’adage « Qui ne dit mot
consent ». Ainsi pour éliminer l’ambiguïté, il faut ajouter des
qualificatifs - en médecine notamment - pour un consentement exprès, libre et éclairé.
La modification de la loi aurait un effet redoutable :
lors d’un acte sexuel, il faudrait exprimer clairement et explicitement son
désaccord, faute de quoi le consentement
serait réputé implicite. Or l’analyse des cas de viols qui s’est énormément
développée ces dernières années dans la lignée du mouvement Metoo#, a mis en
lumière deux éléments qui invalident cette conception du viol : la
sidération de la victime, qui la paralyse, la rend muette, et la dissociation
mentale, qui produit une séparation subjective entre le corps et l’esprit. Ainsi
en matière de sexualité, le consentement est
problématique car on peut consentir par son silence à ce qu’on ne veut pas, ou
à l’inverse consentir par un Oui quand on n’a pas la force ou le courage de
s’opposer. Le viol n’est donc pas incompatible avec le consentement !
L’engagement dans un acte sexuel passe d’abord par des
signes et secondairement par des mots : les mots sans les signes sont
vides, alors que les signes sans les mots sont pleins de sens. C’est l’empathie
vis à vis du désir d’autrui qui est au fondement de l’acte sexuel. Bref
contrairement au calamiteux stéréotype selon lequel non pourrait signifier oui,
il faut apprendre très tôt que non,
c’est non, mais que oui ne signifie
pas toujours oui, et que le silence ne signifie rien. Il faut donc les mots et
les signes : le consentement et l’assentiment. Je soutiens que
l’introduction de la notion de consentement
dans la loi n’aidera ni les victimes ni les juges, bien au contraire.